Iphigénie – Penthésilée – Nausicaa
1996
Personnages | 13, pouvant être interprétés par 3 actrices, 7 acteurs. |
Lieu | Un rivage. |
Durée de jeu | 1h30 |
Argument | Iphigénie, Penthésilée et Nausicaa dessinent en trois actions trois états du rapport conflictuel homme-femme : la violence patriarcale, la confrontation légendaire, la fuite. Le parcours d’Ulysse, figure emblématique de l’homme au masculin et protagoniste commun à ces actions, les rassemble dans une métaphore globale : « Odysséos ». |
Une page de texte
Fragment 1
Iphigénie
Sous la tente d’Agamemnon : les sept rois.
Agamemnon
En dessous de nous, il y a, innombrable,
l’armée des trente nations de la Grèce,
rassemblée par notre volonté.
Cent mille porteurs de glaive y répondent à l’appel,
mille vaisseaux nous attendent, allongés sur la grève.
Face à nous, il y a, au delà de la mer,
l’opulente Ilion, promesse de butin et de lucre,
défit superbe à notre puissance.
Contre nous, il y a le sort néfaste
qui nous tient prisonnier de cette rive.
Contre nous, contre elle-même,
les armes de la Grèce se retournent aujourd’hui,
et, d’elle-même, notre armée doit craindre la menace !
Achille
L’homme est pusillanime.
Passé l’engouement du départ, à la première épreuve,
le doute, l’ennui, la nostalgie l’assaillent.
Le faible pense au retour et s’enferme en lui-même
tandis que le fort, pour exercer sa fougue,
cherche la querelle et la rixe.
Nestor
La discorde est un fauve qui ne montre les crocs
que quand il est trop tard. Elle frappe chaque nuit
et ouvre des coupes sombres dans les rangs des guerriers.
Ulysse
Les peuples de la Grèce sont divers et épars.
Certains cultivent le sol, d’autres
font paître les troupeaux, d’autres encore
marchandent par delà les mers.
Nous séparent nos usages autant que nos montagnes.
Mais à présent nous sommes au coude à coude
et le projet commun devant nous se dérobe !
Alors nos différences s’aiguisent les unes contre les autres.
Ménélas
L’anarchie s’installe, les luttes intestines
gagnent du terrain, parce que, vous, les chefs,
ne savez pas maintenir vos troupes
dans l’esprit de corps et la discipline !
Ajax
Le désordre n’est pas le fait de tous.
Dans le nombre, il en est pour s’affranchir des règles.
On ne les distingue pas tout d’abord dans le rang,
mais avec l’oisiveté, le naturel revient,
il se donne libre cours.
Il nous revient d’imposer le bon ordre !
Ulysse
Au combat comme sur le banc de nage,
ce qui fait la valeur, la distinction,
ce sont la force et la bravoure.
Au camp d’Aulis, ce qui fait la valeur et la distinction,
c’est l’entregent et la richesse !
Chez les plus fortunés, les quartiers de bœuf
tournent sur les broches et les tentes retentissent
du son des flûtes et du rire des putains.
Cependant d’autres n’ont, pour varier l’ordinaire,
qu’à racler les coquilles sur les rochers
et, pour passer le temps, à traîner leur ennui
sur la rive désolée. Faut-il s’étonner que,
nourries des envies, des rancœurs,
s’enveniment les dissensions ?
Si le départ et la guerre ne viennent pas promptement
nous mettre tous à part égale, la grande armée des Grecs,
avant d’affronter l’ennemi, se détruira elle-même.
Diomède
Le danger qui menace aujourd’hui notre armée,
c’est sa puissance-même. C’est sa puissance qui,
ne pouvant pas se déployer,
s’inverse et se retourne contre elle.
Nous ignorons le temps qu’il nous faudra encore
– prisonniers des vents- demeurer sur cette grève.
Mais ce temps que nous ignorons
est l’allié du barbare. Il le protège mieux
que le font les remparts de Troie. Il nous détruit
plus sûrement que les rangs serrés de ses guerriers.
Tous les chefs
Le danger qui menace aujourd’hui notre armée,
c’est sa puissance-même. C’est sa puissance qui,
ne pouvant pas se déployer, se retourne contre elle.
Agamemnon
Depuis trois mois les vents se refusent à nous.
Faut-il y voir un signe des puissances
qui régissent le monde ? Cette entreprise,
noble dans ses motifs, prodigieuse
dans son exécution, irait-elle à leur encontre ?
En ce cas le plus sage
est de tirer à l’eau nos longs vaisseaux,
y charger les armes, les vivres qui nous restent,
et revenir sans gloire à nos demeures.
Achille
As-tu oublié, Roi Agamemnon, que cette guerre,
tu me la fis valoir nécessaire à l’honneur !
Tu fis miroiter à mes yeux les trésors de Troade !
Pour sceller l’alliance, tu me promis ta fille, Iphigénie !
Tu me promis en outre six villes, six cités opulentes
de la verte Arcadie ! Tu prétends aujourd’hui
faire retomber cette fièvre que tu versas en moi ?
Que, sur ta seule injonction, mes guerriers s’en retournent ?
En ce cas, donne-moi les six villes d’Arcadie !
Donne-moi Iphigénie, princesse d’Argolide !
Remplis d’or mes vaisseaux pour le prix de ma honte !
Tous les chefs
Si tu veux que retombe en nous la fièvre de conquête,
que, sur ta seule injonction, nos guerriers s’en retournent,
remplis d’or nos vaisseaux pour le prix de la honte !
Ajax
Donne-moi mille jarres de blé pour la moisson perdue.
Diomède
Mille têtes de bétail, pour les troupeaux décimés.
Ulysse
Et pour le butin négligé : un navire tout armé.
Agamemnon
Vous voudriez que moi, Agamemnon,
Roi des rois, qui l’emporte sur vous tous,
et de loin, en puissance et en richesse, vous voudriez
que je me dépouille, assumant seul le sort néfaste ?
J’affronterais plutôt
vos forces réunies en une bataille impitoyable
que vous élever par ma ruine !
Silence des rois.
Ulysse
Qui a dessein de t’affaiblir ?
Ta faiblesse serait celle de la Grèce toute entière.
Est-ce notre intérêt ?
A l’évidence nos sorts sont liés : ce serait méconnaître
la colère de nos hommes de croire que nous pourrions
revenir sur nos pas sans contrepartie.
Ce serait méconnaître ta valeur
que provoquer l’affrontement avec toi.
Mais céder à la rivalité des chefs
ou rester sourd à la colère des hommes,
ce n’est qu’un choix entre deux carnages.
Nestor
Il faut tout à la fois apaiser la colère des hommes
et susciter du ciel un sort plus favorable.
Que nous, les rois, offrions
un sacrifice à la troupe et aux Dieux !
Devant l’armée des Grecs et en son nom,
j’immolerai les sept plus belles brebis de mes troupeaux.
Le ciel et les hommes auront chacun leur part.
Ulysse
Devant la troupe assemblée et en son nom,
j’immolerai sept béliers à la nuque puissante.
Et le ciel, et les hommes, auront chacun leur part.
Diomède
Je donnerai sept génisses à robe blanche
pour satisfaire aux dieux
et apaiser la colère des hommes.
Ajax
Pour susciter du ciel un sort plus favorable,
je verserai le sang de sept taureaux noirs.
Et nos guerriers auront aussi leur compte.
Ménélas
De ma part, le sang de sept esclaves
coulera sur l’autel pour ranimer
la flamme au cœur de nos soldats.
Agamemnon
Et moi, sur la Pierre du sacrifice, je livrerai
un nombre de victimes égal aux vôtres réunis !
Pour appeler la bienveillance des Dieux !
Pour que l’armée, réconciliée, ait soif de victoire !
Puis nous célébrerons, Achille, tes noces avec Iphigénie.
Et au retour de Troie, tu auras les six villes
de la verte Arcadie. Et tes vaisseaux seront
chargés d’or et d’esclaves. Et vous, les chefs de la Grèce,
lorsque vous reviendrez,
tels seront vos vaisseaux, chargés d’or et d’esclaves !
Fragment 2
Penthésilée
Un rivage de gravier gris. Ulysse. Chœur des âmes des morts dont on réalisera la présence quand il interviendra.
Ulysse
J’étais Ulysse, roi d’Ithaque. Depuis dix ans déjà,
la guerre était finie et la route du retour
s’éternisait, jonchée d’embûches. Depuis dix ans,
avec mes compagnons et la part de butin,
nous errions.
Un jour nous abordâmes
à une grève parsemée de carcasses :
monstres marins, machines et épaves.
Je m’avançais sur le rivage.
» Est-ce ici le Royaume des Morts ? Je suis venu
invoquer les puissances infernales, je suis venu chercher
la clef perdue de mon royaume,
reconnaître la voie qui conduit à Ithaque. «
Le chœur
Ithaque ! Un mythe ! Ici,
passé, avenir et présent se conjuguent.
Tu veux avoir la clef de l’avenir ? Jette les yeux autour de toi, regarde,
c’est cela l’avenir. Cet océan qui charrie des eaux mortes,
cette atmosphère qui nous brûle les poumons.
Vois ce désert qui continue la rive : ici s’élevait une ville
aux tours étincelantes, où résonnait l’activité des hommes.
C’est cela, l’avenir…
Ulysse
J’avançais sur le rivage, enjambant
les débris déposés par les vagues :
objets polis, vestiges des hommes,
cinquante siècles d’industrie vomis par la mer
du plus profond de ses entrailles.
De l’autre côté des vagues s’élevait
une île couverte de forêts, des arbres immenses
dressés vers le ciel : Ithaque.
Ithaque avant qu’une paix trop longue et désespérante
ait mis à bas ses bois.
Le chœur
Tu cherches la clef de ton royaume ?
Cherche-la sous la lie des massacres.
Tu es un homme seul, Ulysse,
debout au milieu des cadavres.
Souviens-toi du sac de Troie
quand le sang des victimes vint grossir comme un fleuve
le cours du Scamandre, souviens-toi
de la prise de Lemnos devant laquelle, des jours durant,
l’écume sur les flots resta teintée de rose,
souviens-toi du massacre des Amazones où le désert changea
en un bourbier sanglant,
souviens-toi du meurtre d’Aulis…
Un choreute
Sur la plage d’Aulis gît le corps d’Iphigénie
les yeux grands ouverts sur le ciel
en une question muette.
Ulysse
La paix était trop proche encore et la troupe
fléchissait dans l’attente du départ.
Alors les hommes furent assemblés
et chacun planta son glaive dans la chair de l’innocente.
Ainsi chacun trancha le lien qui l’unissait
à sa femme, à ses enfants, à sa mère, à sa terre.
Chacun communia dans le meurtre et ainsi,
de ce ramassis d’hommes en perdition sur le rivage,
nous refîmes une armée propre à la conquête.
Un choreute
Sur la plage d’Aulis gît le corps exsangue d’Iphigénie
percé de mille blessures : mille cris.
Ulysse
Que prétends-tu, ombre insidieuse ?
Il n’y a pas de cri, pas de mot pour se rebeller
contre la volonté commune.
Elle est divine, la destinée qui fait de l’un
la proie de tous. Iphigénie,
tu fus sacrifiée au bien commun, à la Grèce,
à la grandeur de la Grèce. Nous avons construit
un autel sur la plage pour sanctifier ta mort.
Iphigénie, Sainte Sœur des Grecs, Patronne des Armées !
Aucune de nos vies ne valait la tienne et plus d’un
dans la plaine de Troie, n’eut d’autre sépulture
que le bec des vautours !…
Le chœur
Sur la plage d’Aulis gît le corps exsangue d’Iphigénie
percé de mille blessures : mille cris !
Mille bouches muettes
et chacune d’elles, une ombre sur le soleil…
(…)
Fragment 3
Penthésilée
Ulysse
Penthésilée ! Tu n’en as pas fini avec l’homme !
Car surgissant de l’abîme nous prenons pied ici
avec la volonté de survivre, de faire souche,
de nous perpétuer !…
Penthésilée ! Tu n’en as pas fini avec nous !
Car déjà il n’est plus homme
celui qui renonce à la lutte pour la vie !
Aussi, je t’en conjure !
Ne nous rendons pas plus complices du néant !
Faisons taire la rancune, oublions les offenses…
Souvenons-nous seulement
du serein abandon qui nous rend l’un à l’autre.
Elle est proche, plus que tu ne crois ! l’harmonie entre nous.
Juste à portée de main, l’entente nous unissant.
Il suffit seulement que vous jetiez vos armes
dans le sable. Et que nous, nous laissions à la mer
s’abîmer nos vaisseaux !
Penthésilée
Homme ! Ne ravive pas la mémoire
des jours anciens ! Car c’est le souvenir
de tes violences qui afflue à mes yeux.
Lorsque mon corps te servait de pâture !
Tu n’en trouveras pas ici, de celles qui oublient,
de celles qui pardonnent ! Tu n’en trouveras pas,
en quête de tes faveurs, de celles qui s’offrent à toi !
Si ce sont nos cœurs que tu veux, viens !
Et arrache-les à nos poitrines !
Si ce sont nos corps, tu les auras inertes,
à jamais délaissés par la vie.
Car n’escompte pas de prisonnière, pas de butin.
Ta victoire sera celle de la mort et tu repartiras
tel que tu es venu. Mais c’est la vie qui vaincra
si nous, nous l’emportons, car par nous
elle se perpétuera et fructifiera sur cette terre.
Ulysse
Tes paroles sont abruptes, tranchantes
comme tes armes. Elles ne laissent aucun choix.
Alors il vaut mieux pour nous périr dans la bataille
qu’une errance sans fin. Et nous éteindre à petit feu.
Mais notre espoir dans ce combat
est de reconquérir en vous la femme.
Une dernière fois ! Rends-toi à l’évidence qui nous fait
l’un pour l’autre ! Sinon, jauge notre puissance !
Et crains-la !
Penthésilée
Ton goût pour les charniers, homme,
l’emporte sur toute autre raison !
Hé bien soit !
Mes sœurs ! En ce combat, la mort
vaut mieux que leur être captives !
Et préférable encore sera notre victoire,
afin que, simplement, la vie ne se finisse !
Bataille : vacarme abstrait d’une guerre « techno ».
(…)
Ulysse, l’enfant.
Ulysse : Dis-moi, petit homme, la lumière tombe… ou est-ce ma vue qui défaille… Où sont mes compagnons ?
L’enfant : Ils se sont dispersés. Chacun erre, perdu dans son histoire. D’autres s’allongent sur le sol. Qu’attendent-ils là ? Je n’en sais rien.
Ulysse : De la Terre il ne reste que ce rivage, encombré de débris ?
L’enfant : Oui, ce rivage, oui, encombré de débris…
Ulysse : Et du ciel, que reste-t-il du ciel ?
L’enfant : Du ciel, il reste cette aube grise.
Ulysse : De l’homme, que reste-t-il de l’homme ?
L’enfant : L’homme meurt mais ses actes demeurent. De l’homme, il reste le souvenir.
Ulysse : Et de la vie, que reste-t-il de la vie ?
L’enfant : De la vie, il reste une herbe verte, un herbe qui pousse dans le désert, qui couvre le désert. De la vie il reste cette herbe, qui pousse partout dans le désert.
L’enfant sort.
Ulysse
Je n’ai plus de nom, mon nom s’est usé
aux hommes que je fus. J’avance sur un rivage,
une frange en marge de trois néants :
Un ciel immense et vide. Les eaux épaisses
d’un océan mort. Un désert qui fut jadis
une ville aux tours étincelantes.
D’autres hommes sans regard errent, hagards, sur la grève.
Ils furent mes compagnons.
Ils perdirent leur âme dans une lutte où, pour sauver leur vie,
il leur fallut tuer la source de la vie, une lutte où chaque victoire
était pire qu’une défaite ! C’est à présent une armée d’ombres
et il faut à chacun négocier son passage
au Royaume de la Mort. Moi, je n’ai plus de nom,
mon nom s’est usé aux hommes que je fus.
Le chœur
Ton nom est Ulysse. Et tu as réclamé la clef de ton royaume !
Ton nom est Ulysse. Et tu as réclamé la clef de ton royaume !
Retourne au temps des hommes, c’est là qu’il t’est à conquérir :
Ithaque.
Entre l’enfant. Il fait le geste de tuer Ulysse.
Fragment 4
Nausicaa
Nausicaa
Ce que je ne t’ai pas dit, Ulysse…
Aujourd’hui, j’apprends que tu pars, peut-être pour toujours. Pour toujours : me prévoir séparée de toi et pourtant, savoir que je t’ai en moi, à jamais. Que je te retiendrai en moi, à jamais…
Je suis une enfant qui joue sur la plage, peut-être une femme déjà, qui rêve à ses jeux d’enfant, mais là-bas, émergeant du varech, il y a une forme étrange sur le rivage, comme un bois flotté… ou une statue : un grand corps d’homme, rude et beau. Mon cœur d’enfant, ou déjà de femme, bat la chamade tandis que je m’approche. Et est-ce encore l’enfant, ou est-ce déjà la femme ? qui s’allonge sur ce corps inerte, pose son souffle sur ses lèvres, lui communique sa chaleur et sa vitalité… Ce n’est alors qu’un jeu car cette merveille marine est trop froide pour retenir la vie.
Pourtant, l’improbable survient. Et là le jeu se brise car dans les yeux qui s’ouvrent, c’est un homme qui advient. J’ai peur, mon cœur cogne au gré de ma frayeur… mais ce regard s’échappe, se fige, se perd en lui-même. Et l’urgence me saisit de le capter, de le retenir dans le mien, de l’y ancrer.
J’ai deviné plus tard que j’attendais cela, et que tu as surgi où je le désirais. Ulysse, mon désir né de la mer. Peut-être est-ce moi qui t’ai façonné de toute pièce, ou selon une forme préexistante. Mais toi, ma créature, à peine t’ai-je animée que tu m’as échappé… De loin, je t’observe : tu marches sur la plage, tu es nu comme un dieu. Ton regard est sûr, ta démarche est formelle : tu habites dans le monde comme dans un palais.
Je sais, moi, et je ne suis alors encore qu’une enfant, je sais qu’il faut te protéger, te soustraire un temps au regard des hommes, t’introduire peu à peu dans leur monde. Moi, toute petite dans ce monde des hommes, j’invente des ruses, des astuces pour que tu y prennes pied, pour que ta place, inexistante, s’y établisse, pour que les hommes y croient, et la respectent. Et aussi toi, tu t’es imposé dans leur monde, ils ont cru en toi et ils t’ont respecté.
Ulysse, tu t’échappes et encore me reviens, tu grandis dans mon désir et moi je nais au tien, mon désir ou le tien, plus rien ne le distingue. Je nais femme dans tes bras, ma tête sur ton épaule, mon corps lové aux contours du tien. Et tu te fais douceur extrême, mes hanches s’arrondissent dans tes flancs et mes seins naissent dans tes mains. Et je saisis vivement tes épaules quand me traverse l’axe du monde.
Ulysse, j’ai dansé pour toi, sur la plage, dans la lumière, heureuse de ton seul regard. J’ai dansé avec les fils de l’air, les miroitements solaires, la rumeur océane, heureuse de ton seul regard. A présent que tu pars, rien n’est à regretter et tout est à garder, de toi, de nous, de notre amour.
Ton départ est mon chagrin, ma douleur, il me sépare de toi comme je suis séparée du monde. Mais où que tu ailles, tu es en moi, à jamais, et ceci est ma force car tu as mis en moi l’amour du monde.
Entre Ulysse. Un temps.
Ulysse, tu pars. Et ce n’est pas toi qui me l’apprends.
Ulysse
Ce n’est pas moi, ma magicienne, car, plus rapide que moi, tu saisis quand survient l’inéluctable.
(…)